La première moitié du XXe siècle n’était résolument pas propice à l’inclusion des identités LGBT+, notamment en France. En 1942 par exemple, un article du code pénal de Vichy statuait que toute relation homosexuelle avec un mineur de moins de 21 ans était criminelle (contre 13 ans pour les relations hétérosexuelles). A savoir que ce cadre légal a été maintenu après la libération… Notons aussi qu’en 1960 – soit il y a à peine plus de 60 ans – un sous-amendement du député Mirguet classait l’homosexualité parmi les « fléaux sociaux » de la France, au même titre que l’alcoolisme, la tuberculose, la toxicomanie et la prostitution.
C’est donc plutôt à partir de la deuxième moitié du XXe siècle, et surtout à partir des années 2000, que le processus pour regagner des droits humains s’est enclenché, permettant ainsi d’émanciper peu à peu les personnes LGBT+ du cadre répressif et des discriminations dont elles font malheureusement encore l’objet. Petit tour d’horizon.
Juin 1970 : la première Pride aux États-Unis
La première Pride est le fruit d’une puissante révolte au Stonewall Inn, un bar de New York sur Christopher Street. Un groupe de personnes lesbiennes, gays, transgenre et travailleurs du sexe s’est rebellé contre les forces de police pour réclamer la fin des arrestations arbitraires. Les forces de l’ordre ont perdu le contrôle et le quartier s’est enflammé pendant 5 jours, jusqu’à confronter 2000 manifestants face à 400 policiers. Un an plus tard, en 1970, une manifestation s’organise pour célébrer cette révolte : ainsi naissait la première Pride. La France connaissait sa première Pride 11 ans plus tard, en 1981.
Mai 1990 : l’homosexualité n’est plus une maladie mentale selon l’OMS
L’OMS a attendu le 17 mai 1990 pour exclure l’homosexualité de sa liste des maladies mentales. Depuis 2005, le 17 mai a été retenu pour consacrer la journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie en commémoration de cette décision (tardive) de l’OMS.
Décembre 2000 : Le Bundestag s’excuse au nom de l’Allemagne pour la persécution des homosexuels pendant le régime nazi
Entre 1935 et 1945, plus de 50 000 hommes ont été condamnés en vertu d’un article du code pénal allemand criminalisant l’homosexualité, et entre 5 000 et 10 000 d’entre eux ont été déportés dans des camps de concentration (les lesbiennes n’étaient pas visées par ledit article). En 2000, le Bundestag a promulgué une loi pour réhabiliter les victimes homosexuelles du nazisme et pour leur donner une place dans la commémoration. Un mémorial a ainsi été créé en 2008 en leur honneur.
Décembre 2000 : Les Pays-Bas légalisent le mariage homosexuel
Ce sont les Pays-Bas qui ont ouvert la voie du mariage homosexuel avec la loi du 21 décembre 2000, entrée en vigueur le 1er avril 2001. C’est dire qu’il y a 23 ans encore, le mariage entre personnes de même sexe était interdit partout dans le monde ! Aujourd’hui il est autorisé dans 30 pays du monde, dont la France depuis 2013.
Février 2009 : Johanna Siguroardottir, première personnalité politique ouvertement homosexuelle à la tête d’un gouvernement
Johanna Siguroardottir a été nommée Première ministre d’Islande le 1er février 2009. Elle est la première personnalité politique ouvertement homosexuelle dans le monde à occuper une telle fonction.
Octobre 2014 : Premier coming out d’un PDG du Fortune 500
Tim Cook, le PDG d’Apple, a signé en octobre 2014 un article dans la revue Bloomberg Businessweek pour officialiser son homosexualité et affirmer sa fierté d’être gay. Quelques années plus tôt, en 2007, John Browne – qui dirigeait la compagnie pétrolière BP – était le premier grand patron dont l’homosexualité a été rendue publique. Mais il s’agissait d’un outing et non pas d’un coming out, et il a dû démissionner peu de temps après suite à un scandale en lien avec cet outing.
Octobre 2016 : Audrey Tang, première ministre ouvertement trans
Audrey Tang, a été nommée ministre du numérique à Taïwan dans le gouvernement de Lin Chuan après une carrière à la Sillicon Valley. Elle est très populaire à Taiwan, qui est par ailleurs le premier pays d’Asie à avoir légalisé le mariage homosexuel (en 2020).
Juillet 2020 : Facebook bannit les contenus qui font la promotion des thérapies de conversion
Les thérapies de conversion sont de prétendues thérapies qui affirment pouvoir changer l’orientation sexuelle d’une personne, notamment à travers des électrochocs, la privation de nourriture, l’exclusion sociale, des exorcismes par des églises ou des pseudo guérisseurs, jusqu’à des viols dits « correctifs ». Ces thérapies de conversion sont extrêmement dangereuses pour la santé mentale et physique des personnes qui les subissent. Elles sont condamnées depuis 2013 par l’Association médicale mondiale en tant que violations des droits humains, mais sont encore pratiquées dans 68 pays, selon un rapport de l’ONU publié en 2020. Il était temps que Facebook les condamne !
On voit donc comment un groupe social, originellement stigmatisé, est parvenu en un temps très court à renverser sa perception au sein de la société. Mais l’Histoire et les progrès ne sont pas linéaires… Et certains « backlash » – ou retours de bâton – sont à déplorer : en février 2018 l’Indonésie a par exemple décidé de reclasser l’homosexualité comme une maladie mentale et en juillet 2020 le président polonais a annoncé vouloir interdire l’adoption pour les couples de même sexe. D’important progrès sont ainsi à reconnaître, surtout depuis 23 ans, mais force est de constater que le combat pour assurer une réelle équité de traitement des personnes LGBT+ n’est pas encore terminé !
Valentine Poisson