Nés au début des années 2000 aux États-Unis, les congés illimités – soit la possibilité pour un employeur d’offrir à ses salariés autant de congés qu’ils le souhaitent – concernent aujourd’hui près de 6 % des employeurs américains, selon une enquête de la Society for Human Resource. Une initiative à première vue progressiste lorsqu’on sait que près d’un tiers des travailleurs ne dispose d’aucun congé payé et que la culture outre-Atlantique de la start-up nation tend à écraser celle de la flexibilité et du bien-être mental des employés.
Néanmoins, prendre autant de vacances que l’on désire cache sa part de risques. Alors qu’on pourrait s’imaginer que les salariés bénéficiant d’un tel système passeraient quatre mois par an à se prélasser sur des plages caribéennes, faisant crasher la productivité de leur entreprise sans scrupule, c’est en réalité l’inverse qui se produit.
Un phénomène de sur productivité émerge et vient balayer le fantasme des salariés-vacanciers. Sur le papier la règle est pourtant simple : les employés se responsabilisent eux-mêmes et peuvent poser autant de jours de congé qu’ils le souhaitent tant que le travail demandé est effectué. Mais au quotidien, ce transfert de responsabilité du travail de l’employeur vers l’employé, couplé à un contrôle accru des résultats, brouille les repères de l’employé et le rende vulnérable face à la pression du groupe.
En découle alors une culpabilité et des tensions au sein du collectif qui dissuadent ce dernier de s’absenter… Bien souvent jusqu’au surmenage. Selon une étude menée par Forbes Advisor, les travailleurs américains jouissants de ce système prendraient une moyenne de 10 jours de congés par an. Et parmi eux, 42% déclarent avoir travaillé sans discontinue pendant ces fameuses vacances.
Finalement, les congés payés illimités relèvent davantage d’un mirage, dont l’usage serait surtout détourné par les entreprises pour les rendre plus attractives. Car cette innovation ne semble avoir de social que son nom, dans la mesure où elle ne prend en compte ni la réalité du terrain, ni les risques psychosociaux qu’elle génère auprès des employés. De là à dire qu’il n’y a rien à garder de cette initiative, pas forcément. Seulement il faudrait d’abord s’assurer que la culture d’entreprise soit capable de garantir des congés réellement déconnectés… Avant de se vanter de pouvoir les accorder.